POÈME DU JOUR : AU DÉSHABILLÉ DE L’OMBRE Bonne sous l’ataraxie du silence : La plèvre d’où émane la respiration chuchotante Laisse t...
POÈME DU JOUR : AU DÉSHABILLÉ DE L’OMBRE
Bonne sous l’ataraxie du silence :
La plèvre d’où émane la respiration chuchotante
Laisse tracer le sang d’une parole
Attachée à un cœur
Âme pulsant son cours
Au déshabillé de l’ombre
Elle brille sur tes lèvres –
Soulignée par
Un sourire
Deviné
Tropismes fléchés dans ta chair
Comme fleurs s’épanouissant –
Tu accueilles le flambant neuf
De la caresse
Ogive pointée de ton regard
Sur la pauvre étoile
Qui tangue dans
Mes doigts
Toi – remuant mon horizontal lointain
Sur le terre-plein qui traverse
Ta tendresse
L’exil mâché par tes mots
Qui s’étirent en
Dansant –
Lance la surprise verticale
De l’instant
Qui expose ton corps
Au plus hâlé des
Désirs pour
Le bateau libre de
Tout horizon
Pendant que s’épuise
Le mystère de
Ton nom
Au creux ferré
De tes amours –
Qui attrape les cordes et l’ancre
Pour aller lâcher des
Feux d’artifice
Vers le large ?
Au plus happé de ton lointain
Ils résonnent avec
Ta parole
Que tu traces comme l’écume
Sous ton vent de
Sable
On la retrouve :
L’inattendue faisant brûler
Le chiffon du désespoir
Et couvrant de soie
Les grandes épaules
D’Éole qui véhicule
La promesse
Pour
Les plus égarées
Les plus fictives
Rencontres
Fixées
Sans autre orientation
Que le lit d’un
Fleuve à son
Embouchure
Fleuve d’amour
Que drainent tes mots devenus
Compatibles avec
Le désert urbain
Où se perdent
Les solitudes
Copyright © Alain Minot |
Analyse :
Le tour du talentueux poète français Alain Minod était, à vrai dire, venu depuis quelques jours mais j’étais pratiquement contraint de le sauter plusieurs fois. En effet, étant donné que je commente chaque jour un poème que je traduis aussi, soit en français pour les francophones soit en arabe pour les arabophones, la longueur un peu démesurée des poèmes de notre ami fait qu’ils sont intraduisibles en une seule journée bien qu’ils soient commentables en quelques minutes. Et j’espère qu’il m’en excusera.
Passons maintenant à ce nouveau poème. Soucieux, comme à son accoutumée, d’atteindre dans sa poésie le plus haut degré possible de poéticité, notre auteur a déployé, comme nous le constatons clairement, un effort considérable pour purifier sa langue des sens lexicaux dénotatifs .Et le meilleur moyen pour y arriver est, comme il l’a fait, de vivre pleinement l’instant poétique , en enrayant complètement l’outil de penser et donnant libre cours à ses compétences siégeant dans l’hémisphère droit du cerveau ( imagination, perception , attention, intuition, affectivité …). Dès lors, le poète se libère des contraintes qu’exerce sur lui la réflexion logique et n’a, par conséquent, que glaner les trésors sémantiques que lui offre son monde intérieur, passé du réel plat et insipide à l’imaginaire, le règne, par excellence, du merveilleux et du fantastique qu'il exprime sous formes de métaphores inédites, de fantasmes bizarres , de sensations étranges , de visions abracadabrantes…Et le tout se déverse en des flots bouillonnants, du début du poème jusqu’à sa fin. Cet état que l’homme contemporain commun assimile à une forme de folie est, en revanche, fort recherché par le poète parce qu’il lui procure les expressions et les images originales dont il a besoin pour fuir la réalité.
Formellement, ce poème a été conçu sous forme d’un discours noué soit entre un locuteur et soi-même donc un monologue soit adressé de lui à un ou une allocutaire. Quant au contenu sémantique, il nous est éclairé par les trois derniers vers (le désert urbain où se perdent les solitudes)qui renvoient à l’état d’isolement et de marginalisation psychologiques dont souffre l’intellectuel dans l’espace urbain qui a passé de « la ville-monde » à une ville inhumaine ou plus précisément « une ville-monstre » où la sérénité , la sécurité et l’ataraxie ont cédé la place à l’angoisse, l’anxiété et l’inquiétude.
Un poème finement ciselé dans lequel les inventions linguistiques déroutantes s’accordent harmonieusement avec le message profond véhiculé.
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