Léa : Histoire d'amour très touchante

C'est une histoire touchante, qui nous donne a tous une bonne leçon de l'amour maternel, parce que c'est un amour éternel.

Le résumé :

Léa était née les paupières closes. Elle était incapable d'ouvrir les yeux et ses parents n'en connaissaient pas la raison. Un jour pourtant, un incident leur rappela un souvenir...

Léa - Écrit par Claire Michault

Léa : petite histoire d'amour touchante
Courte histoire d'amour touchante
- Le soleil est de quelle couleur ?
- Jaune…
- C’est quoi jaune ?
- C’est une couleur…
- Raconte-moi le jaune
- Heu…le jaune c’est le soleil, la chaleur, le miel. C’est la vie, la joie, le bonheur. C’est l’espoir de la jonquille, l’acidité du citron, l’éclat de la topaze, la pureté de l’or, la saveur du safran.
- C’est une belle couleur alors ?
- Oui ! Léa, pourquoi n’essaies-tu pas ?
- Je ne sais pas, j’ai peur…

Léa était née 6 ans et quelques mois plus tôt par une belle nuit d’hiver. La lune offrait son plus beau croissant aux étoiles étincelantes. Il faisait très froid.
Elle poussa son premier cri à 3h19 exactement. 3kgs900, 57 cms. « Votre petite fille est en pleine santé ! Félicitations ».

Hélas… Léa n’ouvrit pas les yeux. Ses paupières restaient hermétiquement fermées. 
Les premiers jours, personne ne semblait s’inquiéter. C’était une question de temps affirmait le pédiatre. Rien d’alarmant. 

Les jours passèrent, puis les semaines, les yeux du bébé ne s’ouvraient toujours pas.
Les nombreux médecins étaient impuissants face au mystère des yeux de Léa. Ils étaient formels sur un point, Léa n’était pas aveugle, le jour où ses yeux s’ouvriraient sur le monde, elle verrait très bien. Les machines étaient muettes, les traitements restaient vains.
Les parents de Léa voguaient d’espoirs en déceptions. Chaque nuit, sa maman pleurait de ne pas connaître la couleur des yeux de sa petite fille. 

- Nous avons fait tous les examens qui existent, Madame, je suis désolé, personne ne comprends le problème de votre fille. Elle est en parfaite santé. Tout fonctionne parfaitement bien. Elle ne présente aucuns symptômes, comment dire, mécaniques. Peut-être devriez-vous songer à la montrer à un pédopsychiatre…
- Docteur, ne me dites pas que ma fille est folle. Elle est née comme ça ! Vous ne comprenez pas, alors vous abandonnez, c’est ça ? Vous nous laissez avec notre tristesse de ne pas connaître le regard de notre fille ! 
- Je suis désolé, la médecine est impuissante face à son refus de voir le monde.
- SON REFUS ?! Comment osez-vous me dire ça à moi, sa mère ! Sous-entendez-vous qu’elle ait choisi son état ? Qu’elle refuse de me voir, de me connaître ? 
- Elle vous connaît Madame, elle vous voit à sa façon, elle reconnaît votre voix, elle sent votre chaleur, elle ressent tout ce qui l’entoure et bientôt elle parlera…
- Comment pourrait-elle parler de chose qu’elle ne connaît pas ?
- Mais elle les connaît, madame, à sa façon à elle. Ses autres sens se sont développés énormément ; Elle capte des sons que nous n’entendons pas. Elle identifie chaque personne de son entourage à son odeur, elle …
- En attendant, vous me certifiez qu’elle n’a rien, pourtant, ses yeux sont toujours clos ! 
J’irai voir d’autres docteurs. Je traverserai la planète, mais je la soignerai ! Un jour elle verra comme vous et moi !
- Je comprends votre désarroi, mais croyez-moi, vous perdez votre temps ! 

Léa grandissait ballottée entre les médecins, les pédopsychiatres, les professeurs les plus connus. Personnes ne comprenait. Aucun ne trouvait la clé de cette énigme.

Le jour de ses six ans, les parents de Léa l’emmenèrent à la côte. Enfant robuste, elle se mit à courir sur la plage. Son rire cristallin s’évanouissait dans le vent. Elle dansait au rythme des vagues. 
Soudain, elle s’immobilisa. Ses lèvres bougeaient mais aucuns sons ne sortaient de sa gorge ; Elle semblait en communion parfaite avec la mer, en prière avec l’immensité. Son père, mi-inquiet, mi-amusé, se dirigea vers elle.
« Laisse-la encore quelques instants… ». Surpris, il se retourna vivement mais ne vit personne à part sa femme qui ramassait des coquillages.
« Je deviens fou ! » pensa-t-il . 

Il est vrai que ces derniers mois avaient été pénibles pour tout le monde. Les nombreux déplacements, les déceptions successives, le stress de l’attente, les espoirs très vite désenchantés, avaient considérablement empiété sur leur vie de famille. Leur fille avait déjà trois ans et il ne l’avait pas vu grandir, obsédé par son désir d’enrayer cet handicap.
Quel avait été son premier mot ? Et ses premiers pas ? Son premier sourire ? Il ne se souvenait de rien, juste ces heures interminables dans les salles d’attente froides et tristes de tous ces docteurs. 
Léa s’asseyait toujours sur ses genoux et donnait la main à sa mère qui lui racontait une histoire ou lui chantait une chanson. 
La petite fille souriait tout le temps et donnait tout l’amour qu’elle pouvait à ses parents, comme si c’était eux qui avaient besoin de réconfort, comme si c’était eux qui vivaient dans le noir.
Elle ne s’est pas plainte une seule fois pendant ses trois années d’examens, de tests parfois douloureux, mais quand ses parents lui ont demandé ce qu’elle voulait pour son anniversaire, elle leur à répondu de sa petite voix douce et scintillante : « plus de docteurs ! », puis , très sure d’elle « je veux aller à la mer ! ».

Plongé dans ses pensées, il ne fit pas attention au petit groupe de jeunes garçons qui se rapprochaient de sa fille. 
Un bruit de pétard déchira le silence de la nature.
Un cri strident, affolé, épouvantable lui fit écho. C’était Léa. Paniquée, elle courait dans tous les sens, cherchant désespérément son père et sa mère.
- Léa, cria-t’il, LEA !
Le vent avalait ses mots laissant Léa dans une angoisse terrifiante
Sa mère courrait, son père était paralysé par son incompréhension. Il sentait un danger mais était incapable de sortir de sa torpeur. Le cri de sa fille l’avait pétrifié. 
Un deuxième pétard, plus fort que l’autre explosa tout près de Léa. 
La petite fille hurla de plus belle. Ayant perdu tout sens de l’orientation, elle courra vers le large. 

- NON, LEA. ARRETE, MAMAN VIENT TE CHERCHER.
- Maman ? Maman ? MAMAN !!!
La voix de sa mère venait de derrière, elle devait faire demi-tour ! L’eau lui montait déjà jusqu’au cou. Une vague plus forte que les autres, lui fit perdre l’équilibre avant qu’elle ait eu le temps de se retourner pour rejoindre ses parents. 

Un vieux pêcheur avait observé ce jeune couple et surtout cette petite fille aux longs cheveux noirs. Elle ressemblait à une petite sirène. Il n’arrivait pas à détacher son regard de l’enfant. Elle dégageait une force indescriptible.
En un éclair tout bascula. Les pétards, les cris, la vague…
Il courut, le plus vite possible. Une énergie inconnue le poussait vers le danger. Rien n’aurait pu l’arrêter, il ne pensait plus, Une seule certitude ; s’il ne la sauvait pas très vite, elle mourrait, emportée par le courant. C’était une question de secondes, sinon, personne ne la retrouverait vivante. 

- Elle respire !
- Les secours sont en route… Comment pourrais-je vous remercier ? Sans vous…Elle serait…. Je… Oh! mon Dieu, merci, monsieur…
- Jean. Ne me remerciez pas, j’étais là au bon moment, au bon endroit. C’est tout.
- Je ne comprends pas, j’étais paralysé, je voyais ma fille se noyer et… je n’ai rein fait ! 
- La peur. Tout s’est passé très vite. Elle est en vie, c’est tout ce qui compte ! J’ai échappé à la mort de nombreuse fois. Je me suis toujours demandé pourquoi. J’ai vu des amis, des proches mourir. Moi, la vie m’a toujours retenu avec mes chagrins, mes manques… Aujourd’hui je suis heureux d’être en vie. J’ai compris que je suis resté sur cette terre pour sauver votre fille. Il y a toujours une raison à tout. Pas de hasard… Ne vous culpabilisez pas, ne perdez pas votre temps avec des questions sans réponses. Tout ceci est arrivé parce que cela devait être ainsi. Demandez-vous pourquoi…il y a une raison à tout.

Jean, le vieux pêcheur, retourna chez lui, l’âme en paix. Il mourut pendant la nuit, son visage était serein et son sourire figé dans l’éternité.

Après une nuit en observation à l’hôpital, Léa pu repartir chez elle. Arrivée dans sa maison, elle se blottit dans les bras de sa mère et des larmes coulèrent sur ses petites joues roses. Elle pleura en silence pendant des heures, ne comprenant pas ce qui lui arrivait. 
Léa n’avait jamais pleuré auparavant.
Ses parents respectèrent son chagrin sans lui poser de questions. Il avait enfin compris que leur petite fille, renfermait un lourd secret dans son cœur mais qu’elle n’était pas encore prête à se confier. Ils restèrent pelotonner tous les trois pendant une bonne partie de l’après-midi. Chacun avec ses propres souffrances. 

Au coucher du soleil, Léa fit une réflexion qui allait déclencher une série de réponses à son refus d’ouvrir les yeux.
- Les boum…Je connais !
- C’était des pétards, Léa, juste des jeux… 
- Non, c’est méchant !
- Léa, dit doucement sa mère, personne n’a voulu te faire du mal. Des enfants jouaient au bord de l’eau et ils ont voulu faire une blague… C’est idiot, je sais ma chérie, mais ce n'est pas méchant.
- Si, Léa recommençait à trembler, c’est méchant ! 

Son papa la prit dans ses bras pour la calmer. Mais l’enfant se débattait. « Ca fait mal à maman et papa il est triste !!! »
- Mon Dieu, Pierre, J’ai compris !

Caroline s’était levée et arpentait la pièce en proie à une grande excitation. Elle réfléchissait tout haut. Une lumière avait jailli dans son esprit ! Tout s’éclaircissait très vite. Un barrage avait cédé brusquement dans sa tête.

- Caro, tu as compris quoi ? Et calme-toi, tu veux !
- Le premier pédiatre qui a examiné Léa avait raison ! C’est elle qui refuse d’ouvrir les yeux ! Elle a eu une grande frayeur quand elle était toute petite !
- Caro, elle est née avec les paupières collées ! Qu’est-ce que tu racontes ?
- Non, ses paupières ne sont pas collées ! c’est son esprit qui rejette la vision du monde et…
- Bon sang, Caro, explique-toi ?
- Tout s’est passé dans mon ventre. Souviens-toi Pierre…Louxor… 

Le matin du 17 novembre 1997, aux alentours de 0900, un commando de 6 hommes portant des uniformes de police noirs arriva à la porte extérieure du temple Hatshepsout à Louxor après avoir assassiné les gardes avec des fusils d'assaut.
Ils se divisèrent en deux parties : 3 hommes restèrent à l'entrée, pendant que 3 autres entrèrent dans le temple et ouvrirent le feu sur les touristes présents. Parmi ceux-ci, certains parvinrent à fuir en se dissimulant derrière des gravats, et la plupart fut pris au piège entre les murs du temple et la face de la montagne.
Les terroristes ont mis environ 40 minutes pour massacrer les touristes. 
Ils les poursuivirent derrière les colonnes du bâtiment, les rassemblèrent devant un mur et les firent s'agenouiller avant de les mitrailler à bout portant, sans être troublés par leurs cris et leurs implorations.
Plusieurs touristes, dont Caroline et Pierre, ont survécu à l’horreur en simulant leur mort. 
Les survivants ont raconté la sérénité méthodique avec laquelle les terroristes abattaient hommes, femmes et enfants.
Sur les 400 personnes présentes dans l'enceinte du temple, ils parvinrent à en tuer 62 et à en blesser 24 avant de prendre la fuite.
Pierre et Caroline se souvenaient en silence, chacun à leur manière, de ce cauchemar. Ils entendaient encore les cris de terreur qui résonnaient dans la grotte mélangés aux hurlements incompréhensibles des tueurs fous. Il ressentaient cette peur effrayante, presque inhumaine de se retrouver devant une mort inéluctable.
Les corps tombaient un à un, le sang se mélangeait à la poussière du sol. 
Caroline reçu une balle, elle s’écroula dans un cri de souffrance. Pierre se coucha sur elle, priant de toutes ses forces que ce carnage se termine très vite et qu’une rafale lui fasse retrouver la femme qu’il aimait plus que tout.
- Maman ? la voix de Léa les arracha à leurs pensées noires
- Oui ma chérie ?
- Tu pleures ? Les larmes de Caro coulaient sur les petites mains de sa fille.
- Oui mon bébé. 
- Pourquoi ?
- Léa, écoute bien maman, Quand tu étais dans mon ventre, il s’est passé quelque chose de très grave. Tu ne t’en souviens pas mais ton cerveau n’a pas oublié. Ce jour là, de très méchants messieurs ont fait du mal à beaucoup de personnes. Ton papa et moi avons eu très peur et j’ai été blessée à l’épaule. Ma chérie, je pense que tu as eu aussi très peur. Tu as vécu tout ça dans mon ventre mais tu as tout ressenti. C’est pour ça que tu n’arrive pas à ouvrir tes yeux. Ton esprit refuse de voir le monde. Il a peur pour toi, tu comprends ?
Léa écoutait ce que disait sa mère. Elle sentait que c’était très important pour elle, qu’elle devait bien écouter sa maman. Elle avait l’impression qu’elle connaissait cette histoire.
- Tu m’as déjà raconté ça maman ?
- Non, s’étonna Caroline, jamais.
- Alors, je m’en souviens. C’est comme quand tu me racontais des histoires chez les docteurs, je ne me rappelle plus, mais quand je les relis, je les reconnais. Raconte-moi, maman, c’était qui les méchants ?
Caroline lui relata les faits tels qu’elle s’en souvenait, Pierre l’interrompait de temps en temps avec ses propres souvenirs.
Pierre termina :
- Ensuite, tout s’est arrêté comme ça avait commencé. Ils sont partis laissant derrières eux des centaines d’innocents. Beaucoup étaient morts. D’autres blessés. Je me suis relevé doucement et j’ai pris ta maman dans mes bras. Je croyais qu’elle était morte. Je pleurais en silence, ne comprenant pas pourquoi j’avais survécu. Une femme se leva lentement. Elle vint vers moi et examina maman. « Je crois qu’elle vit, laissez-moi voir son pouls,…oui, il est faible mais elle est en vie ». Elle me fit un sourire et s’occupa des autres personnes. Ensuite les secours sont arrivés et ils nous ont emmenés à l’hôpital..
Tu es née un mois et demi plus tard.

Léa se blottit dans les bras de Caroline et s’endormit jusqu’au lendemain matin.

- Le soleil est de quelle couleur ?
- Jaune…
- C’est quoi jaune ?
- C’est une couleur…
- Raconte-moi le jaune
- Heu…le jaune c’est le soleil, la chaleur, le miel. C’est la vie, la joie, le bonheur. C’est l’espoir de la jonquille, l’acidité du citron, l’éclat de la topaze, la pureté de l’or, la saveur du safran.
- C’est une belle couleur alors ?
- Oui ! Léa, pourquoi n’essaies-tu pas ?
- Je ne sais pas, j’ai peur…
- Léa, ma chérie, je t’ai déjà expliqué que c’était un accident. Qu’il y a plein de choses magnifiques qui nous entourent ! 
- Oui mais, il y a aussi d’horribles choses. Quand papa regarde la télé, j’entends que tous les jours il y a des morts, des gens malheureux, des guerres, des….
- Je sais, tu as raison. On vit dans un monde violent, difficile, injuste. Des gens meurent tous les jours, sans raison mais ce n’est pas pour ça que toi tu vas mourir, ce n’est pas pour ça que tu ne peux pas voir la beauté du monde. Toutes les personnes qui vivent sur cette planète ne sont pas « mauvaises ». Bien au contraire. C’est une infime poignée d’individus qui provoquent ces guerres, juste pour prendre le pouvoir, même s’ils nous font croire autre chose.
- Où on est maman ?
- Dans un endroit magnifique, en pleine nature, s’il te plaît Léa, ouvre les yeux, je suis près de toi, n’ai pas peur, je serai toujours là pour toi, fais-moi confiance, je t’aime…

Un vent léger se leva. Léa était debout. Elle mit les lunettes de soleil que son père lui avait données le matin même, pour ne pas être éblouie par la lumière. Elle prit la main de sa mère et la serra de toutes ses forces. Alors, une énergie énorme l’envahit. C’est à ce moment précis que ses paupières s’ouvrirent, sans effort. 

La première chose qu’elle vit n’était pas le paysage superbe qui l’entourait, ni la couleur du ciel, ni la forme des arbres, non, …ce fut l’amour de sa mère.

Le Copyright © Claire Michault

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